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Gilles MAHE: 51 ans Marié, 3 enfants; Psychologue de l'éducation nationale Adjoint au maire d'Angers, chargé de l'environnement, cadre de vie et du suivi de l'agenda 21; Conseiller communautaire d'Angers Loire Métropole, chargé du suivi de l'agenda 21

samedi 19 mai 2007

L'État Sarkozy

Le hold-up parfait

Sarkozy est d'autant plus dangereux qu'il se révèle d'une habileté diabolique. Il parvient à surprendre tout le monde en jouant souvent à contre-emploi, il juxtapose les propos les plus contradictoires sans que cela gêne personne, il se permet les affirmations les plus aberrantes ou les plus provocatrices, ou étale cyniquement ses amicales relations avec ses copains milliardaires, sans que sa popularité en souffre le moins du monde. Le P.S. en est tout désarçonné et ne sait comment faire face ni comment organiser la riposte. La composition du gouvernement Fillon apporte une nouvelle confirmation de cette capacité à dépouiller ses adversaires de leurs raisons d'être et à les laisser tout désemparés.
Au cours de sa campagne, Sarko s'était déjà payé le luxe, avec la complicité de sa plume Henri Guaino, de récupérer sans vergogne les icônes de la gauche : Jules Ferry, Jean Jaurès, Léon Blum, et même le jeune communiste Guy Môquet, qui n'en peuvent mais. En constituant un gouvernement à sa botte, il a franchi une étape supplémentaire dans son hold-up parfait :
* D'une part, il a débauché quelques individus connotés "à gauche" et réussi à faire croire à une ouverture politique de première grandeur, lors même que 14 ministres sur 16 font partie de l'U.M.P. Il n'est certes pas le premier à tenter cette manœuvre, avec la complicité de quelques politicards toujours prêts à se vendre au plus offrant. Mais, en 1988, Mitterrand n'avait débauché que quelques seconds couteaux de la droite, au demeurant vite retournés dans leur bercail d'origine. Sarkozy, lui, s'est payé Kouchner qui, malgré son soutien à la busherie irakienne et ses divers reniements, continuait d'avoir une bonne image de marque liée à son très lointain passé de French doctor. Et surtout il a offert à Martin Hirsch, responsable d'Emmaüs, sans lui demander de se renier, un poste de haut commissaire qui tend à faire croire que l'ancien maire de Neuilly et l'apologiste d'une France de propriétaires est soucieux des sans-logis... À quoi on peut ajouter la nomination de deux secrétaires d'État naguère au P.S. : le félon Besson, dûment récompensé pour sa trahison sur le champ de bataille présidentielle, et un ancien conseiller de Jospin, Jouyet, qui venait de plaider pour un rapprochement entre le P.S. et Bayrou...
* D'autre part et surtout, il a piqué à la gauche des thèmes majeurs que le gouvernement Jospin n'avait jamais cru devoir mettre vraiment en musique :
- L'écologie : Juppé, n° 2 du gouvernement, se voit chargé d'un grand ministère où il pourrait avoir les moyens, s'il en avait la volonté, de faire vraiment quelque chose, alors que Jospin n'avait offert à Dominique Voynet qu'un strapontin dépourvu de moyens réels. Bien sûr, tout cela, c'est de la mise en scène, et il ne faut certainement pas s'attendre à des miracles. Mais les félicitations accordées par l'autre Nicolas, Hulot, constituent un label précieux pour l'image de marque de Sarko : alors qu'il était le plus mal noté des candidats par les associations environnementales, le voilà promu défenseur de l'écologie !
- Le féminisme : sur 15 ministres, 7 sont des femmes, soit une quasi-parité, et c'est même une femme qui se retrouve à l'Intérieur : grande première ! Bien sûr, si l'on considère l'ensemble des membres du conseil des ministres, elles ne sont que 7 sur 22, soit moins d'un tiers. Mais l'effet recherché est produit, et les électeurs, les médias aidant, n'en sont pas moins persuadés que la parité a été réalisée pour la première fois dans notre histoire... Symboliquement, l'avancée est considérable, et Jospin, en comparaison, fait bien pâle figure.
- L'intégration : Chirac avait déjà nommé, à des postes subalternes, des secrétaires d'État issus de l'immigration. Sarko fait infiniment mieux : il fait de la toute jeune et brillante Rachida Dati une ministre de la Justice, ce qui lui permet également de miser sur la jeunesse et de prétendre ne récompenser que la compétence : il fait d'une pierre trois coups... Les socialistes n'ont jamais eu ce courage ni cette clairvoyance.
En s'appropriant ainsi les thèmes et valeurs de la gauche, tout en annonçant une politique de droite dure et décomplexée, le bushiste de Neuilly ne laisse aucune place à ses rivaux du P.S., qui ne savent quel angle d'attaque adopter et, abasourdis, se préparent à une Bérézina électorale. Pourtant le danger n'a jamais été aussi grand pour la démocratie et pour les droits et libertés. Car jamais, depuis le Second Empire, on n'aura vu pareille concentration de tous les pouvoirs - politique, médiatique, économique, financier et judiciaire - entre les mains d'un seul homme et de ses affidés. C'est pourquoi il faut tout faire pour limiter les dégâts lors des législatives, voire pour essayer de constituer un contre-pouvoir parlementaire à la toute-puissance présidentielle, pour peu que tous les vrais républicains se décident à faire barrage. Malheureusement on en est loin.
P. M.

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